3 décembre 2015

Le sapin s'est invité dans l'appartement.

Le bois du parquet avait besoin de rouge au joue et de paillettes dans les cheveux. L'arbre est entré, trop grand, en se pliant un peu pour passer la porte du salon. Il s'est débarrassé de son manteau en plastique tressé, s'est ébroué près de la cheminée. Je lui ai dit de s'installer, là au chaud, on est bien, tant pis pour les aiguilles sur le parquet, je ramasserai demain, la semaine prochaine, dans un mois, on ne verra pas le temps passer, tant on s'amusera.
Un verre à la main pour le parer de bijoux et le mettre à l'aise, nous mettre à l'aise, je ne sais plus, je crois que l'air chargé d'épices m'a un peu embrouillée.
On s’est endormi les joues rouges et les rêves pleins de paillettes, on en avait besoin, je crois.

30 novembre 2015

J'ai reculé, avancé, titubé et

tournoyé.
Je crois même que j'ai dû un peu arrêter de respirer.
Les gens tombent et se relèvent, parait que c'est ça la vie.
Mais un jour comme ça, beaucoup ne se relèvent pas, et les mots tombent, remontent, chutent et s'affaissent, pour finir par s'écraser tout en bas.
Je me suis meurtrie l'âme à comprendre que les mots ne suffisent pas.

10 septembre 2015

Louloute la chienne a rencontré ses premiers

chiens parisiens.
Mais elle a eu beau sauter, japper, baver, lécher, rien n'y a fait.
Les chiens parisiens sont restés de marbre, bien décidés à garder fermé leur cercle sélect très privé.
Il faut dire qu'avec son allure pelée, ses yeux fous et ses tendances déchetophages, elle ne fait pas vraiment son effet. Je lui ai pourtant dit qu'elle devrait prendre en maturité si elle voulait se mêler à la faune canine habillée-coiffée-manucurée-parfumée des trottoirs du 1er.

5 août 2015

Je cours aux buttes Chaumont avec les autres

parisiens.
J'ai acheté la panoplie serrée pour me fondre dans la masse.
J'ai mis mes baskets roses pour faire pareil.
Je porte la queue de cheval haute pour m'intégrer.
Les parisiens n'y voient que du feu. En début de course.
Parce qu'à la fin, je tousse et je crache et je rougis et je sue et j'halète.
Les filles de la campagne, dans l'atmosphère surchargée de polluants oxydo-azoto-hydrocarburés, se font vite repérées...

17 juillet 2015

J'ai enfin découvert Disneyland Paris et

je suis tombée par hasard sur la parade de Mickey.
M'est avis que quelque chose se tramait sur la piste car Minnie avait un sourire un peu forcé.
Donald est passé devant elle en traînant des pieds, son sourire à lui en disait long sur son quotidien de déprimé.
Mickey quand à lui avait l'air carrément ulcéré. J'ai alors aperçu son regard et tout s'est clarifié. Que Minnie ne l'aime plus, d'accord, mais qu'elle traficote je ne sais quoi avec son soit-disant meilleur ami, c'en était trop.
Et son sourire sadique ne me disait rien qui vaille...
J'ai suivi son regard, et imaginez ma surprise : Donald n'avait pas de pantalon !
Mickey, dans sa colère, lui avait sûrement subtilisé juste avant l’apparition.

Je crois, fort heureusement, que les enfants n'ont rien remarqué.

5 juillet 2015

On s'est perdu sur le périph',

coincés entre les véhicules tout terrains polluants par excès et les vieilles Toyota fumantes polluantes par défaut.
J'ai dû fermer les fenêtres alors qu'il faisait 40°C au dehors, à l'intérieur de la voiture c'était un peu ambiance désertique sans oasis au bout.
Les touristes chinois dans le bus à coté nous regardaient comme des animaux dans un zoo, genre hominidé quecaloris subtropicalis, sp homo transpirus.
L'autolib n'a pas la clim, le bus de voyage ultra-confort, si.
Je leur ai fait des grimaces, ils ont applaudi.

2 juin 2015

J'ai pris le métro toute seule

sans me tromper.
Le sentiment que l'on ressent quand on s'engouffre dans une station de métro seule pour la première fois doit être assez comparable à ce que ressent un naufragé qui découvre pour la première fois une île déserte.
Angoisse et curiosité mêlées, peur de s'égarer tout en sachant qu'on finira par tourner en rond de toute façon...
La faune souterraine est hostile ou pressée. Il faut être aux aguets, souvent. Et retenir sa respiration, toujours.
Veiller et ne pas se laisser prendre dans un nuage de mouches en cravate. Lutter et déjouer les attaques pointus des bêtes sauvages en Louboutain. Anticiper et trouver un endroit sûr et stratégique pour sa survie, celle à la fois loin du brigand/lourdaud/dragueur/fumeur *les ennemis sont partout* et près de la sortie.

Les chemins s'entrecroisent et se retrouvent, sous un couvert presque végétal de canalisations colorées. Pour un peu, je me suis vue jouer à Jane avec un fil électrique pendant. Mais pas sûr qu'au bout de l'allée le Tarzan avec son accordéon aurait été prêt à assurer la réception.

17 mai 2015

J'ai enfin pu trouver un petit cinéma parisien

comme j'en rêvais.
Nous avons traversé Montmartre sous la pluie main dans la main en pressant un peu le pied.
J'ai mangé chinois sur les grandes marches avant d'entrer.
Le bonhomme prostré dans sa petite guérite en bois a marmonné en nous tendant les billets.
J'ai écarté des mains le lourd rideau du hall d'arrivée.
Les icônes des vieilles affiches de cinéma nous ont regardés passer.
Le concierge râlait tout seul en passant le balai.
La poussière volait sous les tapis en se mêlant aux confettis du passé.
La vieille porte en bois a grincé en nous laissant entrer.
Deux sièges rouges placés bien au centre nous attendaient.

Et quand les lumières se sont éteintes, que les grands voilages rouges se sont écartés pour dévoiler l'écran, et que les premiers sons ont retenti dans la pièce au plafond étoilé, il m'a presque semblé entendre dans mon dos le rire mutin d'Amélie Poulain.

7 mai 2015

Le vieux parquet parisien grince sous le poids

de l'amour.
Mon guéridon qui tremblote a accueilli une photo d'une famille qui ne partage pas mes traits.
Mon fauteuil qui roule croule sous des vêtements qui ne sont pas les miens.
Mon tourne-disque qui sautille danse au son de vinyles dont je ne connais pas encore les airs.
Mes livres qui jaunissent rajeunissent au côté de livres sur l'art et sur la culture geek.

Et le chevalet a enfin servi : on peint à deux une toile qui nous ressemble.
Louloute, la chienne, est ravie.

11 avril 2015

J'ai quitté mon appartement pour un autre plus petit

à Paris.
C'était prévisible comme la fin d'un roman de Mary Higgins Clark, mais que vous voulez vous, je suis finalement une fille de peu de fantaisie.
J'ai presque tout pris, le fauteuil qui roule, le vieux tourne-disque qui sautille, les livres qui jaunissent, le guéridon qui tremblote, le chevalet qui ne sert pas. Et louloute, la chienne.

J'ai laissé le frigo high tech pour un qui se dégivre à la main, le canapé en palette pour un d'ikea, la table basse en caisse de bois pour une qui devrait-rouler-mais-ne-roule-pas.

J'ai laissé les parents un peu résignés, les frères et soeurs carrément désespérés, les amies contentes pour moi, les amis tristes et c'est quand qu'on se revoit.

Et j'ai laissé l'éléphant sur le toit, moi aussi j'avais besoin d'évasion. J'espère qu'il ne m'en voudra pas.

1 janvier 2015

La nouvelle année a démarré en fanfare

avec des chiens qui me grognaient dessus, des appels qui ne passaient pas, des rouges à lèvres qui glissaient hors des lèvres, des danses ridicules, des karaokés insupportables, des duvets perdus-échangés-prêtés-retrouvés. Ce que j'ai photographié.
Et des pleurs par défaut, des rires par excès, des huîtres par dizaine, du whisky par gorgée. Ce que j'ai encore photographié.
Autour de 6 heures du matin, las de tous ces enfantillages, mon appareil photo hors de prix a décidé de s'échapper de mon cou pour glisser méchamment vers le sol en un suicide programmé.
Devant l'étendue du désastre (mon appareil photo a presque réussi son coup, ce grand fou), j'ai préféré aller me coucher.

Aujourd'hui, j'ai mal à la tête.
Et les photos sont floues.